A la rencontre de Nadia Benmokhtar, joueuse au FCF Juvisy

Le Championnat de D1 Féminine vient juste de reprendre. Lyon est toujours le favori mais dernière les outsiders se rapprochent. Parmi ceux-ci, le FCF Juvisy Essonne qui aura de bons arguments à faire valoir. Rencontre avec l’une de ses joueuses, la pétillante et dynamique Nadia Benmokhtar.

Qui es-tu Nadia Benmokhtar ?

Je suis née le 31 Août 1985 à Paris (12ème). Je suis donc une des rares joueuses de Juvisy à être originaire de la région Parisienne. J’ai commencé à jouer au football en club à 7 ans. Mon père a été joueur professionnel, il m’a transmis le virus, ainsi qu’à mes frères et sœurs. Ma mère a également fini par être contaminée en tant que supportrice.

Quel a été ton parcours footballistique jusqu’à aujourd’hui ?

J’ai débuté à la VGA ST MAUR. A l’époque, c’était un club phare du football français. J’y suis restée 10 ans, en passant par les équipes de jeunes, puis avec l’équipe de D2 à partir de 15 ans. A 17 ans, j’ai rejoint Compiègne (USCCO) et j’y suis restée 5 ans. J’y ai connu une montée en D1, une redescente en D2, puis une remontée ! Je suis ensuite revenu en région Parisienne, à Bagneux (D2) pour terminer mes études, avant de rejoindre le FCF JUVISY en 2010. Je fais donc partie de la famille Juvisy depuis 5 ans et j’en suis ravie.
 
Tu es de la région parisienne, mais pourquoi avoir choisi Juvisy ?

Je connaissais déjà le club et ses dirigeants depuis de nombreuses années. Lorsque j’étais à Bagneux, j’ai eu une discussion avec Sandrine Mathivet, entraîneur à ce moment-là, qui m’a proposé de tenter l’expérience. Juvisy représentait pour moi l’excellence. Un club que je regardais briller depuis toute petite. Je savais que le niveau y était très élevé et que ça allait être dur de se faire une place, mais je me suis dit “pourquoi pas ?”. Le coté affectif a également joué car j’avais beaucoup d’amies au sein du club. Je n’ai même pas vraiment eu la sensation d’être “nouvelle” en arrivant !
 
Le groupe de la Juv. est jeune et on dit souvent que les jeunes sont durs à gérer. Comment sont ces jeunes filles dans le groupe ?

Nous avons un groupe hétérogène, composé de plusieurs jeunes joueuses talentueuses, mais aussi de quelques cadres expérimentées. L’amalgame se fait bien, les jeunes apportent leur dynamisme et leur spontanéité dans le jeu, mais les plus anciennes et le coach sont là aussi pour leur inculquer l’exigence et pour les “secouer” quand il y a besoin de mettre de l’intensité. Elles ont un fort potentiel, et le club les accompagne pour qu’elles puissent l’exploiter sur le long terme.
 
Quel est ton rôle dans le vestiaire et en dehors ?

Nous avons la chance d’avoir une super ambiance, un groupe où tout le monde trouve sa place. Je m’entends bien avec tout le monde, j’aime rigoler et participer à mettre une ambiance sympa. Mais je me fais aussi beaucoup chambrer en retour ! Je suis aussi proche de la direction du club, et notamment de la présidente, j’ai donc aussi un rôle plus “sérieux”. Nous échangeons beaucoup sur le club, l’avenir, les projets à mettre en place. C’est agréable d’être dans un club où les décideurs sont à l’écoute.

Défenseur, c’est vraiment ton poste ?

J’ai longtemps joué défenseur central dans mes anciens clubs, mais à Juvisy, j’évolue surtout au poste de milieu défensif. Je pense que c’est le poste où je suis le plus à l’aise.
 
Quels sont tes qualités et tes défauts ?

Mes qualités sont surtout défensives, dans la récupération de balle, le duel, et tactiquement dans mes déplacements. Le jeu de tête est aussi une de mes qualités.
En revanche, il y a plusieurs domaines où je dois encore progresser. Dans l’utilisation du ballon notamment, dans la rapidité des choix et la vitesse d’exécution.
 
Juvisy sera ton dernier club ou un autre défi est possible ?

Je jouerai à Juvisy tant que mon emploi du temps (professionnel) me le permettra. C’est mon club de cœur, et j’aurais beaucoup de mal à le quitter. Si j’évolue professionnellement et que je ne peux plus me libérer pour m’entraîner tous les jours à 17h30, je ferai un choix à ce moment-là. Soit d’arrêter complètement et de passer à autre chose, soit de jouer dans un niveau inférieur qui demande moins d’investissement.
 
Tu as un “vrai” métier en parallèle. Peux-tu nous en parler ?

J’ai fait des études dans le marketing et je suis actuellement chargée de sponsoring pour Carrefour France. Je travaille au siège du groupe à Massy. Mes missions consistent à activer les différents partenariats sportifs de Carrefour (avec la FFF, les Equipes de France de football, la Coupe de France, le Tour de France cycliste). Nous organisons des événements, des campagnes publicitaires, des jeux et des actions de communication diverses. Je gère aussi les Boucles du Cœur, un grand événement caritatif. J’ai la chance d’avoir un métier qui me passionne.
 
Que t’apporte-t-il dans la vie en général et sur un terrain ?

Mon métier m’apporte avant tout de la satisfaction personnelle. J’aime m’impliquer dans des projets, progresser, créer des choses et exploiter des idées. D’un point de vue social, c’est nécessaire à mon épanouissement. Aller au bureau, avoir des collègues etc… C’est important pour  mon équilibre, même si c’est sûr que l’emploi du temps est chargé ! Et puis mon travail m’apporte surtout un salaire à la fin du mois (rire) ! Il ne faut pas oublier que dans le football féminin, peu de joueuses vivent du football.

Que conseillerais-tu aux jeunes qui rêvent de devenir PRO ?

C’est un bel objectif, il faut simplement être vigilante, car il y a peu d’élues. Aujourd’hui, seuls 2 ou 3 clubs ont passé leur effectif sous contrat fédéral. Quand on sait qu’il y a aujourd’hui plus d’une centaine de joueuses dans les pôles, combien de joueuses par génération pourront signer des contrats ? Il faut donc, à mon avis, qu’elles gardent en tête leur objectif en essayant de progresser chaque jour au football, mais sans négliger leur scolarité, qu’elles poursuivent des formations. Le club de Juvisy est dans cette démarche, et propose un double projet qui peut être une alternative intéressante au professionnalisme

  Être PRO, c’est encore trop risqué aujourd’hui ?

Tout dépend de la manière dont c’est géré. Certaines joueuses vivent du foot, tout en préparant leur après carrière, à travers des formations, des projets d’investissements. Je m’inquiète juste pour certaines joueuses qui sont sorties du circuit scolaire très jeunes, sans formation, et sans aucune expérience professionnelle. J’ai du mal à imaginer leur “après carrière”. J’espère qu’elles seront bien accompagnées à ce moment-là. Aujourd’hui, aucune joueuse au monde ne gagne suffisamment d’argent pour vivre sur ses rentes à vie. Il faut donc préparer sa reconversion.
 
Que fais-tu en dehors du foot ?

Comme je l’ai dit plus haut, les entraînements + le travail ne laissent plus énormément de temps libre. Mais quand j’en ai, j’aime en profiter. Pour cela, la vie parisienne propose toutes les options : sorties, restaurants, ciné, spectacles, visites ou balades. Je passe beaucoup de temps avec mes amis d’enfance, et ma famille est également dans la région, je peux donc en profiter. J’aime aussi voyager. Ce n’est pas toujours possible selon le calendrier du foot, mais j’essaye de faire un beau voyage par an. J’ai un peu de mal à rester en place.
 
Grâce à ton métier, tu as déjà participé au Tour de France cycliste. La mentalité y est vraiment si différente du foot ?

J’ai côtoyé plusieurs anciens coureurs et c’est vrai que ce sont des sports différents. Les quantités d’entraînement dans le vélo sont astronomiques, les saisons et les compétitions sont organisées différemment. Mais il y a aussi des points communs que l’on retrouve dans tous les sports à haut niveau : l’exigence, l’envie de progresser, l’abnégation et surtout l’envie de gagner.
 
Le football féminin a beaucoup changé en 10 ans. Que lui reste-t-il à accomplir ?

La progression ces dernières années a été très importante : des matchs télévisés, une médiatisation des joueuses, une augmentation du niveau général. Le travail de la FFF et des clubs paye. Ensuite, il y a toujours une marge de progression, notamment au niveau du nombre de licenciés : recruter des petites filles pour solidifier la base. Mais c’est un travail qui s’inscrit dans la durée avec l’aide tous les acteurs du football.

Il semblerait que c’est une période de stagnation dans le développement du foot féminin. Est-ce normal ou inquiétant ?

Nous avons assisté à une explosion après la Coupe du Monde 2011 et tout a été très vite. Aujourd’hui, je ne pense pas que nous stagnions, la progression est plus lente, mais elle continue. Sportivement, l’équipe de France gravit des échelons au classement FIFA et les équipes de jeunes cartonnent. Au niveau médiatique, le nombre de matchs de D1 diffusés augmentent chaque année, Eurosport lance la 1ère émission hebdo, des stars Internationales arrivent dans le championnat … Nous sommes sur la bonne voie. La Coupe du Monde 2015 va peut-être redonner un gros coup de fouet, mais je ne trouve pas la situation actuelle inquiétante, au contraire.
 
Quel est ton plus grand souvenir de foot ?

En tant que joueuse : nos campagnes en Ligue des Champions sont des souvenirs ancrés (1/2 Finale en 2013 et 1/4 en 2011) ainsi que quelques matchs particuliers d’un point de vue personnel, comme un OL- Juvisy à Gerland en 2012.
En tant que spectatrice : Comme tous les Français, j’ai été marquée par 98 ! Mais plus récemment, j’ai vécu une belle expérience avec un Real Madrid – Bayern Munich à Bernabeu en 1/2 finale de Ligue des Champions l’année dernière. L’ambiance était incroyable.
 
As-tu une exclu pour moi ?

Une exclusivité ? Hummm : un girls-band est en cours de création à Juvisy : Nous avons Céline Deville au chant, Inès Jaurena et Julie Soyer en danseuse / chorégraphe, Janice Cayman à la batterie, Duss au synthé et Bretigny à la guitare. Ça va envoyer !  (Rires)

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